mercredi 24 février 2016

Les perles de la vie éternelle, Patricia et Gérard Kammerlocher.



Charlotte Frigent de la Moussardiere est une riche héritière issue de la grande bourgeoisie NAP* qui préfère l'égyptologie au destin tout tracé de reprise des haras ou des chais familiaux. Fraîchement parée du titre de docteur elle se voit offrir l'opportunité de réorganiser les collections inédites du Musée du Caire dont un ami de son beau père, Omar El Fahti, est le directeur. Cette mission se double d'une campagne de fouilles sur le site du futur Musée. S'attachant à répertorier la totalité des pièces conservées dans les réserves, elle peut compter sur le soutien de Karim le meilleur connaisseur des trésors que contiennent les réserves. La simplicité et la compétence de Charlotte lui ont acquis la loyauté de ce fonctionnaire trop longtemps méprisé par les illustres archéologues qui collaborent au Musée.
Les fouilles préliminaires au chantier du futur Musée révèlent une sépulture composée de 22 sarcophages organisés d'étrange façon. L'ouverture de l'un d'entre eux met au jour un ensemble de perles qu'une tablette traduite par Charlotte identifie comme les perles de la vie éternelle. Cette découverte, qui devait rester secrète, fuite bientôt mettant Charlotte en danger car des fondamentalistes veulent détruire les perles parce qu'elles contredisent leurs textes saints. Autour d'elle les morts mystérieuses se suivent.... Existe-t-il un rapport entre le décès soudain de Karim, puis celui d'un archiviste à l'ambassade d'Egypte à Paris, ou encore plus mystérieusement avec le meurtre de Dany l'ex-fiancé de Charlotte 5 ans auparavant et les perles de la vie éternelle ?

Écrit à quatre mains ce roman oscille entre biographie fictive, roman policier et récit d'aventures. Patricia et Gérard Kammerlocher brossent avec une minutie naturaliste saynètes et  rebondissements, dont l'enchaînement emmène le lecteur dans un univers de situations picaresques, d'énigmes rondement décryptées, de personnages plus ou moins inquiétants, qui rappellent certains albums de Tintin. Amateurs d'exotisme, de complots et de malédictions antiques, voici un roman qui ne vous laissera pas indifférent.


* NAP du nom de la ville de Neuilly, et des quartiers d'Auteuil et Passy où se concentre la grande bourgeoisie parisienne.



Les perles de la vie éternelle, Patricia et Gérard Kammerlocher, aux éditions Édilivre 2015

dimanche 14 février 2016

Le feu sous la cendre, d'Anne Waddington.

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Le feu sous la cendre, est un recueil de sept nouvelles d'Anne Waddington paru aux éditions La plume d'Alain.

Quel fil rouge relie Adrien agent de Pôle Emploi, Pierre l'attardé mental, Marcel dont le fils est porté disparu pendant les combats de la Première Guerre mondiale, Annabelle qui sort d'une profonde dépression, le Pépé dans son hospice ou la vieille locomotive identifiée par le numéro 11 ? Celui de la vengeance. D'une vengeance froide, implacable qui prend le temps qu'il lui faut pour s'accomplir, irrémédiable. Dès lors, le titre, tiré d'une réplique de la tragédie Rodogunde de Pierre Corneille, prend tout son sens.  La passion, la haine la plus profonde ne s'éteint jamais. Elle attend juste son heure pour consumer celui qui a commis le mal comme la douleur a consumé la victime.

Ces sept récits habilement construits nous confrontent à nos propres délires. Qui n'a rêvé d'effacer un affront particulièrement humiliant d'une façon définitive ? Pardonner à nos offenseurs ? Certes, mais sans en égarer la liste. Un jour, tôt ou tard il faut passer à la caisse. Sans oublier les intérêts. Outre la délicieuse perversion que développe Anne Waddington dans les châtiments que ses personnages infligent aux agresseurs, elle excelle dans cet entre deux, qui d'une histoire pleinement ancrée dans la trivialité du quotidien glisse subrepticement vers une sorte de surnaturel évident. Comme si, à travers une faille imperceptible, le divin immanent venait réclamer son dû à l'humain qui s'est abandonné à l'hubris. Mais, tout le talent d'Anne Waddington c'est d'éviter la pesanteur dramatique, ses nouvelles sont empreintes d'un mélange équilibré d'humeur sarcastique et d'émotion contenue. Dansant sur cet équilibre fragile que jamais elle ne rompt, elle nous conduit à sa dernière histoire, véritable bijou de noirceur, où la rouerie d'une femme détruite efface éternellement jusqu'au souvenir de l'existence de son bourreau.

À lire avec délectation pour sa puissance cathartique. 


Le feu sous la cendre, d'Anne Waddington aux éditions La plume d'Alain.

Cette chronique a été diffusée le 6 février 2016 lors de l'émission Un jour, un livre, un auteur sur Radio Présence Lourdes.