Le feu sous la cendre, est un recueil
de sept nouvelles d'Anne Waddington paru aux éditions La plume d'Alain.
Quel fil rouge relie Adrien agent de
Pôle Emploi, Pierre l'attardé mental, Marcel dont le fils est porté disparu
pendant les combats de la Première Guerre mondiale, Annabelle qui sort d'une
profonde dépression, le Pépé dans son hospice ou la vieille locomotive
identifiée par le numéro 11 ? Celui de la vengeance. D'une vengeance froide,
implacable qui prend le temps qu'il lui faut pour s'accomplir, irrémédiable.
Dès lors, le titre, tiré d'une réplique de la tragédie Rodogunde de Pierre
Corneille, prend tout son sens. La
passion, la haine la plus profonde ne s'éteint jamais. Elle attend juste son
heure pour consumer celui qui a commis le mal comme la douleur a consumé la
victime.
Ces sept récits habilement construits
nous confrontent à nos propres délires. Qui n'a rêvé d'effacer un affront
particulièrement humiliant d'une façon définitive ? Pardonner à nos offenseurs ?
Certes, mais sans en égarer la liste. Un jour, tôt ou tard il faut passer à la
caisse. Sans oublier les intérêts. Outre la délicieuse perversion que développe
Anne Waddington dans les châtiments que ses personnages infligent aux
agresseurs, elle excelle dans cet entre deux, qui d'une histoire pleinement
ancrée dans la trivialité du quotidien glisse subrepticement vers une sorte de
surnaturel évident. Comme si, à travers une faille imperceptible, le divin
immanent venait réclamer son dû à l'humain qui s'est abandonné à l'hubris.
Mais, tout le talent d'Anne Waddington c'est d'éviter la pesanteur dramatique,
ses nouvelles sont empreintes d'un mélange équilibré d'humeur sarcastique et
d'émotion contenue. Dansant sur cet équilibre fragile que jamais elle ne rompt,
elle nous conduit à sa dernière histoire, véritable bijou de noirceur, où la
rouerie d'une femme détruite efface éternellement jusqu'au souvenir de
l'existence de son bourreau.
À lire avec délectation pour sa
puissance cathartique.
Le feu sous la cendre, d'Anne Waddington aux éditions La plume d'Alain.
Cette chronique a été diffusée le 6 février 2016 lors de l'émission Un jour, un livre, un auteur sur Radio Présence Lourdes.
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